Emploi
Le travail en France est régi par des règles strictes, l’une des plus importantes étant le contrat de travail. Ce contrat contient trois éléments : le lien de subordination (sans contrainte, ni pression excessive), la prestation de travail et enfin la rémunération, qui est établie en fonction de la prestation. Il existe une multitude de contrats différents avec des spécificités propres à chacun d’entre eux. Le plus connu étant le CDI (contrat à durée indéterminée), qui est le contrat le plus répandu en France. Son principal aspect est le fait qu’il ne prévoit pas d’échéance. Cela ne veut pas forcément dire qu’il est infini, il peut être arrêté avec un accord commun (démission, rupture conventionnelle…) ou par un événement (licenciement, liquidation économique…). Par ailleurs, il existe des variantes comme le CDI intermittent avec des périodes travaillées et des périodes chômées. Cependant, ces dernières années, le CDI traverse une phase compliquée où il n’est plus forcément le contrat de travail de référence sur le marché français et notamment dans le domaine de l’informatique, où les freelances sont de plus en plus présents. On peut se demander alors si le CDI n’est pas en train de dépérir au profit de nouveaux contrats plus agiles.
Le CDI est-il toujours le contrat numéro 1 en France ?
Lorsque l’on regarde les chiffres donnés par France Travail (anciennement Pôle Emploi), la question est tout à fait légitime. En effet, les intentions de recrutement en CDI ont fortement reculé. Les CDI représentent 38,2 % des intentions de recrutement en 2024, ce chiffre était de 54,3 % en 2023 et de 45,2 % en 2019. À cela s’ajoute un recul du nombre de projets de CDI, passant de 72 % en 2023 à 61 % en 2024. Cette étude de France Travail ne tombe pas au meilleur moment alors qu’une réforme de l’assurance chômage est prévue pour bientôt par le gouvernement. Dans le domaine de l’IT, en 2023, France Travail comptait 865 469 dont 67% en CDI.
Cette baisse de la demande de CDI s’explique en partie par les difficultés globales dans le domaine du recrutement, ce qui entraîne de surcroît une diminution des CDI. À noter que des solutions ont été mises en place pour encourager le CDI au détriment de contrats d’intérim ou CDD. Depuis le 1er janvier 2024, l’employeur est obligé, avant la fin d’un CDD ou d’un contrat d’intérim, de notifier sa proposition de CDI de manière formelle, s’il veut continuer avec le salarié. La proposition de l’employeur doit porter sur le même emploi et sur le même lieu de travail. En cas de refus, l’employeur est obligé d’informer France Travail. Pour le salarié, deux refus de CDI peuvent entraîner la privation du droit à l’allocation chômage. Enfin, il faut tout de même rappeler que selon Statista, 73 % de la population active est en CDI, ce qui montre bien que le CDI est loin d’être dépassé. Pourtant, il est de plus en plus décrié par certains qui ne le voient plus comme la norme du travail mais comme un frein à la productivité.
Les avantages et inconvénients du CDI
L’un des principes du CDI est la sécurité de l’emploi, qui peut être perçue comme bénéfique par certains, mais pour d’autres, pas obligatoirement. On peut se demander si le CDI ne serait pas une prison dorée, où le salarié, sachant son poste garanti, ne fournit plus les efforts nécessaires. Effectivement, si le salarié a passé réglementaire du temps à son poste, il est considéré comme ayant travaillé, quelle que soit la qualité de son travail. Tant qu’il n’a pas commis d’erreur grave aux yeux de la loi (et non de l’employeur), son contrat ne peut être remis en question. Pour les employeurs, cela peut devenir un véritable casse-tête. Côté employé, tout n’est pas rose car en restant longtemps dans un poste bien défini, on peut perdre en valeur. Cela peut devenir compliqué de vouloir voir ailleurs.
Pour autant, le CDI offre des avantages non négligeables comme le fait de pouvoir créer une véritable culture d’entreprise avec des valeurs qui y sont attachées. De plus, en CDI, les salariés peuvent s’impliquer plus fortement dans les décisions prises par l’entreprise. Pour certains postes à haute responsabilité, le CDI sera toujours privilégié afin de mener à bien des projets sur le long terme.
Dans le domaine de l’informatique (IT), la pertinence d’un CDI varie en fonction des postes occupés. Par exemple, un DSI (Directeur des Systèmes d’Information) ou un RSSI (Responsable de la Sécurité des Systèmes d’Information) a tout intérêt à être en CDI, car cela lui permet de mieux comprendre les enjeux et les besoins à long terme de l’entreprise. En revanche, pour un Chef de projet ou un Développeur, le statut de freelance est souvent plus avantageux, car ils sont davantage liés aux missions qui leur sont confiées qu’à l’entreprise elle-même.
Les alternatives au CDI
Il existe par ailleurs des alternatives au CDI. L’une des plus utilisées en IT est le contrat freelance. Ce processus permet à une personne travaillant à son compte, de réaliser une mission (ou plusieurs), pour le compte d’un ou plusieurs clients. En fonction des besoins de ces clients, le freelance peut être amené à prendre la forme d’un CDI qui serait externe à l’entreprise. Ce type de contrat offre une liberté quasiment totale pour les deux parties qui peuvent rompre ou juste ne pas prolonger le contrat de travail. Il est tout de même important de souligner que cette solution n’est pas parfaite. Le fait d’externaliser une ou plusieurs missions peut s’avérer complexe notamment lorsque des données sensibles sont en jeu. De plus, l’entreprise est moins apte à avoir un regard sur le travail demandé. Dans le monde de l’IT, beaucoup de personnes proposent leurs services en freelance, mais ce phénomène complexifie le choix pour l’entreprise.
Récemment, de nouveaux modèles de CDI sont apparus. L’entreprise Cahra, un cabinet de transition, a mis en place un CDI “Agile”. Le principe, un contrat à durée indéterminée avec un choix du temps de travail sur une année civile (par exemple, 8 à 9 mois). L’objectif de cette démarche est de répondre aux nouvelles attentes des managers qui veulent plus de liberté avec davantage de choix. Un autre enjeu est d’attirer et garder les talents qui peuvent être potentiellement séduits par cette flexibilité. Avec ce type de contrat, le CDI est à la carte et n’est plus une fin en soi. Cahra s’est fixé comme cap 10 % de ses managers en CDI “Agile”. Un des points qui intéresse surtout les candidats, c’est la possibilité de faire du télétravail. Sur ce point le CDI et la freelance proposent ce mode de travail.
Le CDI est en pleine mutation pour faire face aux nouveaux défis du marché. Les employeurs et les employés explorent de nouveaux modèles de travail qui répondent mieux aux exigences contemporaines de flexibilité et de dynamisme. Cette évolution est nécessaire pour maintenir un équilibre entre sécurité de l’emploi et adaptabilité aux marchés fluctuants. Car même s’il diminue en nombre de contrats en activité, le CDI reste un objectif et une valeur sûre dans le monde professionnel.
On peut ajouter, en tant que chasseur de tête : ce que cherche les candidats en termes de contrat de travail, ce que les employeurs privilégient er comment ces choix influencent les stratégies de recrutement
Clément Fradique