Recrutement
Le CDI senior : une solution ciblée pour l’emploi des plus de 60 ans
Face au taux d’emploi historiquement faible des seniors en France, le gouvernement a lancé en 2025 un nouveau contrat de travail expérimental, baptisé CDI senior ou Contrat de Valorisation de l’Expérience (CVE). L’objectif : permettre à des demandeurs d’emploi âgés de 60 ans et plus de sécuriser leur fin de carrière, tout en répondant aux besoins de certains secteurs en tension. Ce dispositif, à la croisée des enjeux sociaux et économiques, suscite à la fois espoir et réserves.

Un contrat taillé pour la sécurisation des fins de carrière
Le CDI senior s’adresse aux demandeurs d’emploi âgés de 60 ans ou plus, ou à partir de 57 ans dans les branches qui le prévoient par accord de branche. Il est réservé aux personnes qui n’ont pas été salariées de l’entreprise au cours des six derniers mois et qui ne perçoivent pas encore de pension de retraite.
Le contrat est conclu en CDI classique, mais il est conçu pour prendre fin automatiquement une fois que le salarié atteint l’âge et la durée d’assurance requis pour une retraite à taux plein. Cette particularité vise à éviter les périodes de chômage en fin de carrière et à garantir une transition fluide vers la retraite, sans décote. Les salariés peuvent ainsi valider les trimestres manquants tout en conservant un emploi stable.
Ce contrat est compatible avec la retraite progressive, permettant aux salariés d’aménager leur temps de travail à l’approche de la retraite. Toutefois, ce dispositif reste soumis à l’accord de l’employeur, ce qui peut en limiter l’accès dans la pratique.
Un outil incitatif pour les entreprises
Du point de vue des employeurs, le CDI senior présente plusieurs avantages financiers. La principale incitation est une exonération de 30 % des cotisations patronales sur l’indemnité de mise à la retraite, pendant une durée de trois ans à compter de la signature du contrat. Cela peut représenter une économie non négligeable, notamment pour les entreprises confrontées à des besoins de recrutement urgents.
Le dispositif offre aussi une souplesse juridique appréciée. Contrairement à un CDI classique, le contrat prend fin de plein droit lorsque le salarié atteint l’ensemble des conditions de départ à la retraite à taux plein. Cette clause permet aux entreprises d’avoir une visibilité sur la durée d’engagement, sans avoir à initier une procédure de licenciement ou de rupture conventionnelle à terme.
Certaines branches professionnelles – notamment dans les secteurs de l’aide à domicile, du bâtiment ou du transport – pourraient y voir une opportunité de faire appel à des profils expérimentés, dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Le succès du dispositif dépendra néanmoins de sa réception dans les petites et moyennes entreprises, qui restent les principales pourvoyeuses d’emplois locaux.
Des critiques syndicales et des limites structurelles
Le caractère hybride de ce contrat suscite de vives critiques du côté des syndicats. La CGT et Force ouvrière, notamment, dénoncent un « CDI à durée déterminée déguisé », dans la mesure où la rupture est prévue à l’avance, dès que le salarié atteint les droits à la retraite. Pour eux, cela entre en contradiction avec l’esprit du CDI, censé garantir une relation de travail stable et durable.
Autre point de vigilance : le risque d’effet d’aubaine pour certains employeurs, qui pourraient être tentés de recruter des seniors dans une logique purement financière, sans perspective réelle d’évolution professionnelle. De plus, les droits des salariés en fin de carrière pourraient s’en trouver affaiblis, notamment s’ils souhaitent continuer à travailler au-delà de l’âge légal pour bénéficier d’une surcote ou améliorer leur retraite.
Enfin, des experts pointent une inégalité potentielle d’accès : le contrat ne s’applique qu’aux personnes inscrites à France Travail et n’est pas ouvert aux retraités en cumul emploi-retraite. Par ailleurs, toutes les branches ne prévoient pas encore l’élargissement à partir de 57 ans, ce qui pourrait créer des disparités sectorielles et territoriales.
Une expérimentation à suivre jusqu’en 2030
Le CDI senior est mis en place à titre expérimental pour une durée de cinq ans, jusqu’en 2030. Il fait partie d’un ensemble de mesures issues de la réforme des retraites et de l’accord national interprofessionnel signé en 2023 sur l’emploi des seniors. L’objectif est clair : évaluer son efficacité réelle sur le retour à l’emploi des 60 ans et plus.
Selon les données du ministère du Travail, en 2024, seulement 38 % des 60-64 ans étaient encore en activité en France, contre 61 % en Allemagne et 70 % en Suède. L’enjeu est donc considérable, tant sur le plan économique (alléger la charge des retraites) que social (lutter contre l’exclusion professionnelle liée à l’âge).
L’évaluation du dispositif devra porter sur plusieurs axes : taux d’embauche, qualité des emplois, durée réelle des contrats, accès aux dispositifs de retraite progressive et adhésion des branches professionnelles. Le gouvernement n’exclut pas, selon les résultats, de pérenniser ou généraliser le CDI senior au-delà de 2030.
Clément Fradique
Face au taux d’emploi historiquement faible des seniors en France, le gouvernement a lancé en 2025 un nouveau contrat de travail expérimental, baptisé CDI senior ou Contrat de Valorisation de l’Expérience (CVE). L’objectif : permettre à des demandeurs d’emploi âgés de 60 ans et plus de sécuriser leur fin de carrière, tout en répondant aux besoins de certains secteurs en tension. Ce dispositif, à la croisée des enjeux sociaux et économiques, suscite à la fois espoir et réserves.
Un contrat taillé pour la sécurisation des fins de carrière
Le CDI senior s’adresse aux demandeurs d’emploi âgés de 60 ans ou plus, ou à partir de 57 ans dans les branches qui le prévoient par accord de branche. Il est réservé aux personnes qui n’ont pas été salariées de l’entreprise au cours des six derniers mois et qui ne perçoivent pas encore de pension de retraite.
Le contrat est conclu en CDI classique, mais il est conçu pour prendre fin automatiquement une fois que le salarié atteint l’âge et la durée d’assurance requis pour une retraite à taux plein. Cette particularité vise à éviter les périodes de chômage en fin de carrière et à garantir une transition fluide vers la retraite, sans décote. Les salariés peuvent ainsi valider les trimestres manquants tout en conservant un emploi stable.
Ce contrat est compatible avec la retraite progressive, permettant aux salariés d’aménager leur temps de travail à l’approche de la retraite. Toutefois, ce dispositif reste soumis à l’accord de l’employeur, ce qui peut en limiter l’accès dans la pratique.
Un outil incitatif pour les entreprises
Du point de vue des employeurs, le CDI senior présente plusieurs avantages financiers. La principale incitation est une exonération de 30 % des cotisations patronales sur l’indemnité de mise à la retraite, pendant une durée de trois ans à compter de la signature du contrat. Cela peut représenter une économie non négligeable, notamment pour les entreprises confrontées à des besoins de recrutement urgents.
Le dispositif offre aussi une souplesse juridique appréciée. Contrairement à un CDI classique, le contrat prend fin de plein droit lorsque le salarié atteint l’ensemble des conditions de départ à la retraite à taux plein. Cette clause permet aux entreprises d’avoir une visibilité sur la durée d’engagement, sans avoir à initier une procédure de licenciement ou de rupture conventionnelle à terme.
Certaines branches professionnelles – notamment dans les secteurs de l’aide à domicile, du bâtiment ou du transport – pourraient y voir une opportunité de faire appel à des profils expérimentés, dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Le succès du dispositif dépendra néanmoins de sa réception dans les petites et moyennes entreprises, qui restent les principales pourvoyeuses d’emplois locaux.
Des critiques syndicales et des limites structurelles
Le caractère hybride de ce contrat suscite de vives critiques du côté des syndicats. La CGT et Force ouvrière, notamment, dénoncent un « CDI à durée déterminée déguisé », dans la mesure où la rupture est prévue à l’avance, dès que le salarié atteint les droits à la retraite. Pour eux, cela entre en contradiction avec l’esprit du CDI, censé garantir une relation de travail stable et durable.
Autre point de vigilance : le risque d’effet d’aubaine pour certains employeurs, qui pourraient être tentés de recruter des seniors dans une logique purement financière, sans perspective réelle d’évolution professionnelle. De plus, les droits des salariés en fin de carrière pourraient s’en trouver affaiblis, notamment s’ils souhaitent continuer à travailler au-delà de l’âge légal pour bénéficier d’une surcote ou améliorer leur retraite.
Enfin, des experts pointent une inégalité potentielle d’accès : le contrat ne s’applique qu’aux personnes inscrites à France Travail et n’est pas ouvert aux retraités en cumul emploi-retraite. Par ailleurs, toutes les branches ne prévoient pas encore l’élargissement à partir de 57 ans, ce qui pourrait créer des disparités sectorielles et territoriales.
Une expérimentation à suivre jusqu’en 2030
Le CDI senior est mis en place à titre expérimental pour une durée de cinq ans, jusqu’en 2030. Il fait partie d’un ensemble de mesures issues de la réforme des retraites et de l’accord national interprofessionnel signé en 2023 sur l’emploi des seniors. L’objectif est clair : évaluer son efficacité réelle sur le retour à l’emploi des 60 ans et plus.
Selon les données du ministère du Travail, en 2024, seulement 38 % des 60-64 ans étaient encore en activité en France, contre 61 % en Allemagne et 70 % en Suède. L’enjeu est donc considérable, tant sur le plan économique (alléger la charge des retraites) que social (lutter contre l’exclusion professionnelle liée à l’âge).
L’évaluation du dispositif devra porter sur plusieurs axes : taux d’embauche, qualité des emplois, durée réelle des contrats, accès aux dispositifs de retraite progressive et adhésion des branches professionnelles. Le gouvernement n’exclut pas, selon les résultats, de pérenniser ou généraliser le CDI senior au-delà de 2030.
Clément Fradique